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« L’Église ne peut être réduite à la spiritualité »

Une série d’entretiens réalisés par le magazine Reformiert interroge différents points de vue autour de la question de l’engagement politique des Églises. Ici la pasteure Catherine McMillan défend qu’il est de leur responsabilité première que de prendre parfois position politiquement. (2/2)
Alors que l’engagement des Églises en faveur de l’initiative pour des multinationales responsables a été vivement critiqué par certains, à l’interne comme à l’extérieur, et alors que d’autres votations se préparent autour de ces questions environnementales, le magazine alémanique Reformiert publie une série d’interviews de pasteurs sur la légitimité de cette prise de parole. Protestinfo a choisi de sélectionner deux opinions divergentes sur la question. Pour la pasteure zurichoise Catherine McMillan, également «porte-parole réformée» sur la télévision suisse alémanique, les Églises ont le devoir de s’engager sur la scène politique. Sans cet engagement, elles se videraient de leur substance. Entretien.

Catherine McMillan, l’initiative pour des entreprises responsables a semé la discorde. L’objet en valait-il la peine?

L’Église a montré ce qu’est le christianisme: défendre les gens qui sont lésés. Les failles étaient là avant. Il faut parfois rendre les tensions visibles pour pouvoir avancer.

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Même si ce conflit a généré des démissions?

Je suis attristée par tout départ de l’Église. Mais je me sentirais hypocrite si je ne prenais pas le risque de me ranger du côté des défavorisés.

Selon l’analyse de Vox, la majorité des réformés ont refusé l’initiative. L’Église serait-elle en train de se politiser au-delà de sa base?

De nombreux membres ont perdu le contact avec les valeurs réformées. Ils n’assistent pas aux offices, ont reçu peu d’éducation religieuse. Les personnes qui viennent à l’office veulent des éléments de réflexion en rapport avec notre époque. J’ai toujours de bons retours lorsque je prêche sur des sujets d’actualité.

Néanmoins, une Église constituée démocratiquement devrait légitimer ses positions de manière démocratique.

Je savais que les œuvres d’entraide de l’Église étaient derrière moi. C’est la chose la plus naturelle du monde que l’Église soutienne ses œuvres caritatives. Pendant des années, nous avons célébré des services pour la campagne de Carême. Et quand nous avions enfin une chance de réussir, nous aurions dû nous taire?

« Si nous n’osons pas prêcher politiquement, autant jouer de la cornemuse en chaire! »

Je suis irritée par la façon dont les gens d’Église se sont laissés déstabiliser par la campagne des opposants et disent maintenant que la campagne menée en faveur de cette initiative était une erreur. Le message de l’Église n’est pas à vendre. Elle a un seul Seigneur: Jésus-Christ. Nous devons nous demander comment adopter au mieux une vie de disciple.

Et l’initiative pour des entreprises responsables en fait partie?

Je n’ai jamais dénié à quelqu’un son identité chrétienne. J’ai simplement exprimé comment je comprenais mon propre christianisme. Bien sûr, les gens pourraient s’irriter de cette position. J’ai eu un dialogue ouvert, qui a également été enrichissant pour moi.

Y a-t-il un risque que l’aile conservatrice de l’Église se retire?

Oui. Et ce serait néfaste, car beaucoup de conservateurs sont attachés à l’institution de l’Église. Nous ne pouvons pas simplement ignorer leurs opinions. En ce qui concerne l’euthanasie, par exemple, j’ai tendance à être conservatrice. Bien sûr, il y a aussi des réformés qui veulent réduire la protection sociale et l’aide au développement ou rejeter le sauvetage en mer. Néanmoins, l’Église a la vocation de défendre les faibles; elle ne peut être réduite à la spiritualité. Zwingli le formulait ainsi: «Les grands de ce monde sont prêts à tolérer la prédication de la vérité, tant que leur arbitraire n’est pas mis au pilori.» Si nous manquons de courage pour prêcher politiquement – pour citer à nouveau ce réformateur – nous pouvons tout aussi bien jouer de la cornemuse en chaire!

Là est tout le problème: certains membres se sentent mis au pilori.

Qu’ils aient honte, je peux le comprendre. La honte n’est pas compatible avec le message de la grâce. Pourtant, il y a des situations où nous devons assumer ce risque, notamment lorsqu’il s’agit d’apartheid ou de racisme par exemple.

Presque personne ne le nie.

Pour moi, cela inclut également la lutte pour l’humanité envers les demandeurs d’asile et contre l’exploitation économique. J’ai étudié intensivement les discours de Martin Luther King. Il est frappant de voir à quel point ils résonnent avec l’actualité. Depuis la prison, il écrit comment les Églises blanches modérées l’ont déçu en ne soutenant pas le boycott des bus: «Le nombre de membres du clergé qui sont restés silencieux derrière la sécurité assourdissante de leurs vitraux était bien trop important.» Cette image m’a fait penser à notre Église.

L’Église se défile-t-elle?

Je consacre beaucoup de temps à la pastorale et la diaconie est depuis longtemps mon centre d’intérêt. L’Église a une mission de réconciliation. Mais en passant sous silence les différences et les griefs, nous ne faisons pas la paix. Martin Luther King écrit qu’il a pleuré, mais que c’étaient des larmes d’amour. L’amour est l’élan: l’amour pour le Christ, pour l’Église, pour le monde.

Chrétiens TV

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